[f° 45v. 139/669 au recto. Papier du manuscrit. Tous les textes sont barrés à grands traits, mais pas simultanément.]

 

De là un art Cet art, les comprachicos l'exerçaient. Ils achetaient des enfants, travaillaient un peu cette matière première, et la revendaient ensuite. Ce commerce se fait encore à l'heure qu'il est en Egypte.

Les vendeurs étaient de toutes sortes, depuis le père misérable se débarrassant de sa famille jusqu'au maître utilisant son haras d'esclaves. Vendre des hommes était un fait simple. [phrase ajoutée] On se rappelle, il y a de cela moins d'un siècle, l'électeur [corrige "le landgrave"] de Hesse vendant ses sujets au roi d'Angleterre pour les faire tuer en Amérique. On allait chez l'électeur de Hesse comme chez le boucher, acheter de la viande. L'électeur de Hesse tenait de la chair à canon. Il accrochait ses sujets dans sa boutique. Achetez, c'est à vendre. ["On allait chez...": addition; elle en remplace une autre, en interligne, et remplace le texte initial: "Chair à canon commencée."] En Angleterre au dix-septième siècle, ["En Angleterre..." ajouté] après la tragique aventure de Montmouth, il y eut force ["grands" barré] seigneurs et grands hommes ["suppliciés" baré en correction cursive] écartelés et décapités. Ces supliciés laissèrent des épouses et des filles; veuves et orphelines que ["le roi" barré] Jacques II donna à la reine sa femme. La reine vendit ces ladies à Guillaume Penn. Il est probable que le roi [corrige "Jacques II"] avait une remise, un tant pour cent. Ce qui étonne, ce n'est pas que Jacques II ait vendu ces femmes, c'est que Guillaume Penn les ait achetées. [ajout d'écriture très cursive en marge: "Ce qui excuse Penn [variante sans choix ou addition: " ou explique l'emplette de Penn"], c'est qu'ayant un désert à ensemencer d'hommes, il + besoin de femmes" la suite est rendue illisible par le collage de la feuille à un onglet pour la reliure.]

[Ces deux paragraphes sont la rédaction antérieure des trois premiers de 0, 2, 4, f° 23-24]

Les comprachicos [", insistons-y": addition abandonnée] étaient de toutes les nations ["et de toutes les +" barré] Tous les idiomes mêlés étaient leur langue. [phrase ajoutée] C'était tout la gueuserie de l'univers ayant pour industrie un crime. Crime toléré, nous venons de le dire. La loi fermait un oeil, le roi ouvrait l'autre. Les comprachicos étaient, avec un but hideux au lieu d'un but sublime, une franc-maçonnerie. [deux lignes et demie barrées non lues s'achevant par "ils vivaient, à demi patentés"] Nous avons vu de nos jours en Espagne une affiliation de ce genre, dirigée par un trabucaire nommé Ramon Selles durer trente ans, [+ + barré] de 1836 à 1866, tenant sous la terreur [corrige "sa griffe" qui corrige "sa serre"] trois provinces, Valence, Murcie, et Alicante. [affiliation également notée au f° 111 et employée en 0, 2, 4, f° 24] Les comprachicos vivaient par bandes, un peu baladins, un peu médecins, n'ayant avec les autres nomades aucune ressemblance, incapables de vol. C'étaient d'honnêtes gens. ["n'ayant avec..." remplace trois lignes corrigées et barrées] Ils poussaient une porte, entraient, marchandaient un enfant, payaient et l'emportaient.

Les gypsies étaient payens, les comprachicos étaient chrétiens; et même bons chrétiens. Il y avait parmi eux des catholiques et des portestants. Ce mélange [variante sans choix: "pêle-mêle"] n'ôtait rien à leur ferveur. Les comprachicos étaient «loyaux» à [corrige "envers"] Dieu comme au [corrige "envers"] le roi. [paragraphe en addition; repris du f° 111]

Ils rodaient dans tous les pays. En Galice leur trace est restée dans ce cri d'intimidation [la coupure de la feuille ici ne laisse pas lire la suite, ni non plus la note marginale qui traduit et dont on ne lit que les débuts de ligne: "(1) Prends garde [...] le comprachicos [...] venir!"] [ce dernier détail repris en 0, 2, 4, f° 27]